MRAP50

ADN VIKING

samedi 27 juin 2015 par mrap

Saint-Lô le 27 juin 2015

Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche

1, rue Descartes

75231- Paris cedex 05

Objet : Université de Leicester : recherches génétiques à Valognes (50700)

les 15 et 16 juin 2015

Madame la directrice générale,

Nous vous adressons, ci-joint, les éléments d’un dossier qui nous semble poser la question majeure de la finalité d’une identification à des fins scientifiques des empreintes génétiques d’un groupe d’individus.

Nous attirons votre attention sur le fait que la dépêche de l’Agence France Presse du 15 juin, relatant le déroulement des prélèvements et des entretiens, a été reprise par de nombreux médias et donné à l’opération une ampleur incontestable. Elle a notamment suscité contre le Mrap « obscurantiste, communiste et pro arabe » des commentaires hostiles.

Nous prenons acte que, par un courriel du 11 juin, le Docteur Richard Jones, de l’ Université de Leicester, responsable du programme de recherche génétique, nous a assuré que : « son équipe est pleinement consciente de la nature sensible de cette étude et de la responsabilité qui nous incombe. Nous condamnons toute forme de racisme et prendrons toutes les mesures afin de garantir que les résultats de ce projet ne peuvent servir à justifier aucune forme d’intolérance. »

Nous avons également relevé que Monsieur Pierre Bauduin , directeur du Centre de Recherches Archéologiques et Historiques Anciennes et Médiévales (CRAHAN), laboratoire du CNRS et de l’Université de Caen, a manifesté une certaine réserve à l’égard du projet en déclarant : « J’avais prévenu mes collègues britanniques que c’étaient des questions extrêmement sensibles en France. »

Par ailleurs, il existe dans le département un courant se rattachant à la « normanité » qui est notamment incarné par Fernand Lechanteur (1910-1971), écrivain et héraut de la langue et de la culture normande et par ceux regroupés autour de la publication sur les parlers et traditions populaires de Normandie « Le Viquet » et celle s’inscrivant dans la mythologie nordique « Heimdal ». Selon les plus racialement radicaux d’entre eux, il y aurait dans la Manche deux populations : l’une au sud du département, composée de brachycéphales bruns et l’autre au nord, composée de dolichocéphales blonds au yeux bleus. Ce courant considère que les premiers ont une âme d’esclave et ont besoin d’un maître. Ce maître, c’est le descendant viking envahisseur. Ces racistes là placent certainement de grands espoirs dans les travaux de l’université de Leicester.

Nous refusant à faire le moindre lien entre eux et les chercheurs de cette université, vous comprendrez néanmoins que le Mrap soit vivement préoccupé par des dérives relatives à la ségrégation ou à des discriminations en raison de caractéristiques génétiques, postulant l’appartenance de certains habitants du Cotentin, ayant des ancêtres Normands, à une ethnie supérieure. (Confer : la une du journal La Manche Libre, édition de Cherbourg, montrant des guerriers prêts au combat sous le titre « Etes-vous d’origine viking ; titre d’un article du journal Ouest-France, reprenant la déclaration d’un participant « Fabuleux si j’étais viking » !) Nous avons donc interpellé le Syndicat Intercommunal du Pays d’Art et d’Histoire Briquebec-Saint Sauveur le Vicomte, qui a accepté de relayer l’étude menée par l’Université de Leicester, pour connaître si, le consentement donné par votre ministère sur à la conformité déontologique aux lois françaises, dont ce Syndicat se prévaut, a pris en compte le retour à chaque personne, ayant fait l’objet d’un prélèvement, d’un rapport individuel relatif à son profil ADN, avec une méthode d’interprétation.

En l’absence de réponse du Syndicat à ce jour, nous permettons de vous solliciter aux fins d’avoir la confirmation que votre ministère, via le Centre National de la Recherche Scientifique, a bien validé l’ensemble de la démarche et en particulier le retour, que nous contestons, de ce rapport individuel. Le fondement de sa diffusion, nous semble d’autant moins pertinent que le Docteur Richard Jones a déclaré : « Cinquante générations se sont écoulées depuis le Xe siècle, ce qui conduit à travailler sur seulement 2% de l’ADN contemporain (…) personne ne peur se prévaloir en Cotentin d’être un descendant de race pure de nos ancêtres scandinaves (…) cette étude n’a de valeur qu’historique et scientifique. »

Sur ce point et au strict plan juridique, il importe aussi de souligner que la loi N° 87- 17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dans le point I de son article 8, précise : « Il est interdit de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques des personnes ». Le point II de cet article définit les catégories de données qui ne sont pas soumises à cette interdiction et les sections I et II de la loi, les formalités préalables à la mise en œuvre des traitements devant être respectées : saisine de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés, décret en Conseil d’Etat. Avant de légitimer les recherches scientifiques (confer également l’article 16-11 du code civil), votre ministère s’est-il assuré que les acteurs partie prenante de l’opération se sont effectivement conformés à toutes les obligations juridiques leur incombant ?

Dans l’attente, nous vous prions de croire, Madame la directrice générale, en l’assurance de nos sentiments respectueux.

Le président du comité du Mrap,

Jacques Declosmenil

Pièces jointes :

Lettre du Mrap du 16 mai

Réponse du Syndicat du 19 mai 2015

Lettre du Mrap du 7 juin 2015


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